Responsable activité facteurs humains

Angélica Leal : Responsable d’Activité « Facteurs Humains », SRC Bertin Technologies

Quel est votre parcours ?

J’ai fait une école de design au Brésil, à l’issue de laquelle j’ai obtenu un diplôme de Designer Industriel de Produits (équivalant à un Bac+5 en France). Pendant cette formation, j’ai souvent été confrontée à un problème classique du domaine : des produits très beaux mais inutilisables. J’ai découvert l’Ergonomie pendant ma formation initiale et j’ai décidé de devenir une « meilleure » designer en étudiant et intégrant cette discipline à mes compétences. Je suis venue en France pour me spécialiser dans l’ergonomie « à la française », et j’ai enchaîné 5 ans d’études dans le domaine (master en Ergonomie puis doctorat).
J’ai toujours travaillé pendant mes études (j’ai obtenu mon premier CDI en 1998, pendant ma formation de designer), et je travaille en tant qu’Ergonome en France depuis 2003 (l’année d’obtention de mon DEA). Mon intégration au monde professionnel s’est toujours passé d’une manière naturelle : j’étudiais une partie de la journée et pendant l’autre partie j’appliquais les connaissances acquises dans la « vraie vie »…

En quoi consiste votre métier au quotidien ?

En tant qu’Ergonome, mon travail quotidien consiste à comprendre comment les personnes travaillent « pour de vrai », pour intégrer leurs problèmes, difficultés, idées d’optimisation et amélioration dans la conception ou re-conception des moyens de travail (au sens large : systèmes, Interfaces  Homme-Machine, outils, procédures, organisations, etc.) nécessaires à l’accomplissement de leurs activités.

Qu’est-ce qui vous a séduit pour faire ce métier ?

Il s’agit sans doute de pouvoir jouer le rôle de « traducteur » dans le cadre de la (re)conception des moyens de travail. En effet, souvent on a l’impression que les « utilisateurs finaux », les personnes qui vont utiliser dans leur vie quotidienne les moyens conçus, et les ingénieurs « concepteurs », les personne qui imaginent ces moyens, ne parlent pas la même langue. L’ergonome, dans ces cas, a véritablement un rôle de traducteur car il aide, au travers d’outils et méthodologies particulières, à « traduire » les besoins des utilisateurs finaux en recommandations pour la conception. Et de l’autre côté, les concepteurs ont aussi des exigences (techniques, temporelles, budgétaires…), qu’il faut prendre en compte et « traduire » en contraintes pour les utilisateurs, tout en évaluant si ces contraintes sont acceptables du point de vue des activités à accomplir.

Qu’est-ce qui vous plaît le plus dans votre métier ?

C’est de pouvoir donner la juste valeur au travail des personnes, notamment dans le cadre du contrôle de systèmes complexes. Les personnes disposent de compétences surprenantes de récupération des systèmes défaillants, et développent des capacités fondamentales qui permettent d’éviter des catastrophes potentielles. Dans les médias, on aime bien pointer du doigt quand les choses se passent mal et la catastrophe arrive. Mais il ne faut pas oublier que quotidiennement, dans tous les domaines à risques (aviation, ferroviaire, nucléaire, pour ne citer que les plus significatifs), des femmes et des hommes œuvrent avec acharnement pour éviter d’en arriver-là.

Quel est le projet sur lequel vous avez travaillé dont vous êtes la plus fière ?

Entre 2011 et 2013, j’ai travaillé pour le plus grand producteur d’énergie français, en appui à leur département « Ingénierie », pour la conception d’un réacteur nucléaire « nouvelle génération » en Angleterre. J’ai contribué à la définition du programme de travail visant l’intégration, très en amont dans le processus de conception, des problématiques liées aux « facteurs humains », afin d’augmenter la sûreté, la sécurité mais aussi la performance globale de cette nouvelle centrale nucléaire.
Je suis très fière de ce projet car le rôle de « traducteur » n’a jamais été aussi saillant dans ma carrière. Tout le monde parlait anglais dans le projet, le problème n’était pas là… Mais au-delà du choc « classique » en ergonomie, entre utilisateurs et concepteurs, il y avait aussi la diversité culturelle, avec les différentes pratiques en ergonomie et en ingénierie, les différents niveaux d’exigences et d’attentes, les valeurs et notions implicites derrière chaque action, chaque mot… c’était très « challenging », difficile mais motivant.
Et j’en suis encore plus fière maintenant parce que nous avons été sollicités à nouveau en 2014 et faisons partie, une fois de plus, de l’équipe en charge de l’intégration des  facteurs humains dans la conception de la future centrale nucléaire britannique.